Le CNIT, anciennement Centre des Nouvelles Industries et des Techniques, affiche fièrement sa coquille de béton brutaliste depuis 1958 dans le quartier de La Défense à Paris.
Conçu à l’initiative d’Emmanuel Pouvreau, président du syndicat des constructeurs de machines-outils, par 3 architectes Grand Prix de Rome, Jean de Mailly, Robert Camelot et Bernard Zehrfuss, le CNIT est, avec la grande Arche, l’un des bâtiment les plus emblématiques de l’esplanade de La Défense à Paris.
Parcourant à plusieurs reprises l’esplanade de La Défense ces dernières années, j’ai eu l’occasion d’apprécier les courbes du CNIT et de les photographier au milieu des chantiers perpétuels qui l’entourent…
La voûte du CNIT, chef-d’œuvre d’architecture du XXe siècle
Digne de l’architecture gothique, selon l’ancien ministre de la culture André Malraux, l’immense voûte Impressionne toujours de l’extérieur comme à l’intérieur, plus d’un demi-siècle après sa création.
Cette voute constitue la substantifique moelle d’une architecture intemporelle et audacieuse et témoigne du savoir-faire de l’ingénierie française d’après-guerre.
Elle reste aujourd’hui le seul élément resté intact de l’édifice originel, puisque façades et intérieur ont étés détruits et refaits lors de plusieurs rénovations.
Les trois architectes du CNIT surnommés « les rois mages », d’après plusieurs sources non documentées, resteront peut-être au firmament de l’architecture grâce à cette voûte céleste, classée monument historique.
Pourtant, il faut savoir que si son crayonné vient d’une inspiration de l’architecte Jean de Mailly, elle tient son existence à l’ingénieur Nicolas Esquillan qui a inventé et façonné cette double coque de béton armé autoportante, en voile mince avec raidisseurs.
Véritable prouesse technique inégalée à ce jour dans le monde pour une telle portée, la voute est constituée de deux coques en béton de 6,5 cm d’épaisseur séparées par du vide.
Sa conception se rapproche de celle d’une aile d’avion.
Le CNIT mesure 46 mètres de haut et chacun de ses cotés fait 218 mètres de long, s’inscrivant dans un triangle équilatéral.
Le toit est composé par 3 « éventails » comportant 18 fuseaux déployés à partir des 3 culées en béton de 84 tonnes chacune, coulées jusqu’à 12 mètres de profondeur.
Bien que la voute soit autoportante, 44 tirants de câbles en acier participent à maintenir sa forme de voile gonflée.
Immaculée conception
La toiture peinte en blanc depuis l’origine, ayant beaucoup perdu de son éclat, à été rénovée en 2011.
Les travaux de restauration ont constitué à coller à chaud du verre cellulaire avec du bitume et à recouvrir l’ensemble de feutre puis de PVC pour maintenir l’étanchéité et retrouver un peu la blancheur immaculée d’origine.
Le CNIT, le CNIT enterré, le CNIT martyrisé, mais le CNIT libéré ?
Le CNIT, première construction du futur quartier de la Défense fut inauguré en 1958 par le Général de Gaulle.
Le bâtiment jouxtait, à l’époque de sa construction, un rond-point où s’affichait depuis 1883 la statue « la défense de Paris » (qui donnera son nom au quartier d’affaires).
Enterrement de première place
Au cours de ses trois premières décennies, le CNIT est passé de son trône isolé, au sommet d’une colline de Puteaux, dans l’axe royal du Louvre et de l’Arc de Triomphe, à un enfouissement partiel dans le parvis de La Défense.
Il a perdu près d’un quart de sa partie visible, au fur et à mesure que le quartier sur dalles se construisait autour de lui à partir des années 1970.
Au fil du temps, des tours 2 à 4 fois plus hautes l’ont encerclé, faisant perdre au bâtiment de sa monumentalité.
Fin de vide
En 1989, lors d’un vaste projet de rénovation, le CNIT s’est vu « amputer » d’une grande partie de l’espace dédié auparavant aux grandes expositions ainsi que de ses escaliers « cocottes », pliés comme des origamis, qui avaient fait sensation en 1958.
Pour ces travaux, le bâtiment fût complètement vidé, et la voûte mise à nue apparu dans toute sa splendeur aux yeux des parisiens.
A tel point qu’un collectif de sept architectes composé de Mario Botta, Paul Chemetov, Borja Huidobro, Renzo Piano, Aldo Rossi, Alvaro Siza et James Stirling lança alors un appel pour que cet espace fabuleux sous la voûte soit préservé.
Au final, l’intérieur fut réaménagé comme prévu avec un immeuble de cinq étages et des commerces disposés en arc de cercle autour d’un atrium, réduisant la magie intérieure de cette grande bulle futuriste.
A l’extérieur, les façades rideaux conçues par l’architecte Jean Prouvé furent détruites mais en partie reconstruite à l’identique.
En 1989 l’acronyme du CNIT prend un nouveau sens et se transforme en « Centre des Nouvelles Industries et Technologies ».
Résurrection douve-amère
En 2009, le CNIT est restructuré une nouvelle fois et il regagne un petit peu de son prestige architectural passé.
Coté sud, Il est séparé de l’urbanisme sur dalles grâce à l’aménagement d’une sorte de douve. Il se retrouve alors relié du côté de la place de La Défense via cinq passerelles, laissant entrevoir sa base.
Les culées en béton sur lesquelles repose la coque nervurée redeviennent un peu plus visibles du ciel et en bordure de la place.
À l’intérieur, la dalle à hauteur de l’esplanade est ré-ouverte en partie, permettant de créer des accès inférieurs sous le niveau du parvis de la Défense et de retrouver une hauteur sous voute proche de l’origine.
Les vitrages intérieurs de la galerie marchande sont en partie blanchis pour mieux diffuser la lumière.
Le CNIT au bout du tunnel ?
Entre 2020 et 2022, le dessous du Cnit a été complètement remanié pour permettre la création de la nouvelle gare RER R, construite à 30 mètres de profondeur sous l’édifice.
La prouesse du chantier à constitué à sectionner 120 des 250 poteaux qui supportaient le Cnit depuis sa création et de construire une dalle de béton de 3 mètres d’épaisseur soutenue par de nouveaux piliers qui remplacent les anciennes fondation !
Si la restructuration de 2009 lui avait redonné un peu d’air, la nouvelle version de 2023 devrait remettre à l’honneur la voute grâce à de nouveaux accès spectaculaires aux niveau des pilées Est et Ouest.
A suivre…
Malgré quelques atteintes à son architecture, le Cnit reste l’une des figures de proue de l’architecture brutaliste des trente glorieuses dans la banlieue parisienne, comme la Maison du Peuple de Pantin ou encore la cité du XXIe siècle à Créteil.
Le CNIT, exposant 3
- Une construction triangulaire équilatérale
- Une voûte composée de 3 éléments reposant sur 3 culées
- Un triumvirat d’architectes à sa réalisation.
- Un enfouissement sous dalle à hauteur de 3 étages.
- 3 rénovations en cinquante ans.
- 3 inaugurations : les 12 septembre 1958, 4 octobre 1989 et 21 octobre 2009.
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Sources principales de cet article : « CNIT, histoire et perspectives » aux éditions Philippe Chancerel, « Cnit ou les temps modernes » aux éditions cherche midi éditeur, le site defense-92.fr
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