Ouvert à Lyon fin 2014, le Musée des Confluences conçu par le cabinet d’architectes autrichien Coop Himmelb(l)au se veut être une véritable sculpture architecturale.
Posé sur un immense socle de béton, il trône fièrement dans un endroit unique et rarissime pour une grande ville, à la confluence d’un fleuve majestueux et de son plus gros affluent.
Déconstructivision architecturale
Avec son architecture facettée un peu clinquante, le « nuage de cristal », ainsi nommé par ses concepteurs, est un marqueur architectonique impossible à manquer à l’entrée sud de Lyon.
Strass et facettes
A l’ère des réseaux sociaux et du tourisme « selfiesque », le Musée des Confluences est devenu hautement « instagrammable » et il participe désormais, plus encore par son coté atypique et photogénique que par son côté culturel, au rayonnement touristique de Lyon.
L’office de tourisme de la ville de Lyon l’a d’ailleurs très bien compris puisqu’il capitalise désormais sur l’une de ses rares icônes architecturales modernes, sans oublier pour les initiés, le musée Lugdunum de Richard Zehrfuss, en plaçant sa « sculpture touristique » ONLYLYON à portée d’objectif de la sculpture des architectes autrichiens de Coop Himmelb(l)au.
Vision déconstructiviste
Le Musée des Confluences est représentatif d’une philosophie déconstructiviste de l’architecture.
Coop Himmelb(l)au exprime sur son site internet, sa volonté de créer une « architecture ouverte et instable » et de produire des œuvres architecturales comme des « sculptures fonctionnelles ».
L’architecture qui en découle s’avère à la fois complexe structurellement et décomplexée esthétiquement.
La conception 3D qui fait partie intrinsèque du processus de création de ce cabinet d’architecte dirigé par Wolf D. Prix permet toutes les audaces et fantaisies constructives.
Divergences cristallines
A la vue du bâtiment et de son aspect global assez chaotique, il est difficile d’y rester indifférent.
Même si cette approche de l’architecture ne correspond pas à mes goûts personnels, la fragmentation des formes générée par ce véritable origami architectural rend le sujet particulièrement intéressant pour un photographe d’architecture comme moi, qui aime à composer avec des détails.
j’ai donc pu constituer une quantité d’images, dont vous voyez ici un échantillon, qui enrichissent ma photothèque personnelle d’architecture minimaliste.
Le Musée des Confluences, tryptique atypique
Le Musée des Confluences se divise en trois éléments principaux : un socle, sur lequel sont posés le « Cristal », grande verrière constituant l’entrée du musée, et le « Nuage », corps de bâtiment principal hébergeant les salles d’exposition.
Une architecture de pointe
Construit sur des terres alluvionnaires à l’extrémité de la presqu’île lyonnaise, à l’intersection du Rhône et de la Saône, le Musée des Confluences apparaît comme une sorte d’immense vaisseau futuriste posé entre deux eaux.
Le bâtiment a nécessité d’être stabilisé par une coque en béton de près de 190 m de long par 90 m de large et 8 m d’épaisseur.
Un « Socle » aux pieux musclés
Semi-enterré le « Socle » du musée est constitué de béton armé d’un volume équivalent à une dizaine de piscines olympiques.
Il contient, entre autres, deux auditoriums ainsi que des espaces techniques et des parkings qui ont été en partie reconfigurés en fin de construction en espaces de stockage pour le musée.
Les aléas de la construction ont fait qu’il a fallu s’y prendre à plusieurs fois pour aller chercher de bons appuis sous les niveaux des deux cours d’eau.
Les 536 piles de soutènement qui maintiennent le socle atteignent au final une profondeur d’une trentaine de mètres au lieu des 19 mètres prévus initialement.
L’architecture crâne
Le « Cristal », une verrière bodybuildée
Le nom donné à cette section du bâtiment pourrait laisser supposer une certaine finesse ou fragilité mais la structure métallique visible et très « musclée » de l’ensemble donne plutôt la sensation d’une extrême solidité. On y accède par un large escalier traversant toute la hauteur du socle.
La verrière de 30 mètres de haut est composée d’une structure en acier recouverte de plus de 500 m2 de verre.
A la poupe du musée des Confluences, le « Cristal » constitue l’immense hall d’accueil principal qui accueille des publics de tous âges, aux cerveaux avides de connaissances ?
Un coup de poing architectural
Geste architectural complètement creux, le « puits de gravité », comme le surnomment ses concepteurs, est une démonstration de force et de vide qui donne un aspect « défoncé » à la structure métallique.
Ajoutant un appui central inutile, ce puits ne fait que compliquer un peu plus l’architecture du musée et participer au coût de construction final démesuré.
L’architecture gloubi-boulga futuriste du hall d’entrée fait écho à ma version personnelle minimaliste et dérisoire d’une architecture de « fin du monde » imaginée en conclusion de l’un de mes reportages photographique traitant du brutalisme à Bordeaux.
Un « Nuage » de poids
Cœur du musée comportant les lieux d’exposition sur 4 niveaux, le « Nuage » est composé d’une charpente métallique de 600 tonnes recouverte de nombreuses plaques d’inox qui réfléchissent la lumière de façon spectaculaire, ce qui rend cette partie du bâtiment particulièrement photogénique.
La conception 3D transparait par toutes les arêtes et les nombreuses facettes du Nuage et la structure, surélevée en majeure partie, s’appuie sur 14 poteaux et 3 gros piliers en béton.
Traverses sous entrailles
Le « Nuage » avec ses multiples déformations et son bas ventre bosselé qui pourrait évoquer, pour les plus imaginatifs, le film Alien, surplombe un bassin d’eau et permet une traversée piétonnière sous le musée.
A la proue du vaisseau futuriste, de larges escaliers donnent accès jusqu’à une esplanade en partie couverte par le « Nuage » et surplombée par des gradins.
Plusieurs rampes d’accès en quinconce relient le musée au grand jardin du confluent.
Forum convivial
Malgré son imposante stature, le bâtiment limite son emprise au sol et libère des espaces de circulation agréables dans lesquels lyonnais et touristes ne manquent pas de se promener.
L’endroit s’avère assez prisé des jeunes lyonnais et attire souvent une population bigarrée de créateurs, danseurs, dj, acrobates, photographes et vidéastes, comme j’en rencontre aussi fréquemment sur le parvis de la Bibliothèque Nationale de France à Paris.
Construction à la dérive
Une ambition lyonnaise démesurée ?
A la fin des années 1990, deux des plus hauts élus lyonnais, Michel Mercier, président du conseil général du Rhône et Raymond Barre, maire hippopotamus de Lyon, ont ambitionné de marquer Lyon de leur empreinte.
S’inspirant de la création spectaculaire de Franck O. Gehry pour le musée Guggenheim de Bilbao, ils ont voulu que Lyon connaisse à son tour un geste architectural marquant dans un emplacement stratégique sur le confluent, à l’entrée sud de la ville.
Une programmation inconséquente
Le projet du cabinet d’architecture autrichien Coop Himmelb(l)au qui remporta le concours était estimé à 61 millions d’euros.
Il semblerait que le cahier des charges de l’époque ne prenait pas en compte le lieu exact d’implantation du musée, ni, par conséquent, l’état des sols très fragiles constitués uniquement d’alluvions sur lesquels il serait construit.
Une première étape, réalisée avant 2010 pour la création des fondations, engloutit finalement plus que le budget initial prévu pour la totalité du projet !
Après l’abandon du premier constructeur, un second, le français Vinci, se vit attribuer le reste de la construction.
Un coût final de réalisation faramineux
Le bâtiment détient probablement pour longtemps encore, le record de la plus coûteuse construction de Musée en France : entre 250 et 300 millions d’euros, selon les sources et les modes de calcul.
Pour une surface nette construite de 26 700 m2 on atteint un ratio d’environ 11 000 €/m2.
Ce ratio dépasse de beaucoup celui de la philharmonie de Paris, la plus récente « catastrophe financière » concernant une construction à vocation culturelle.
Quant aux autres récents musées français, pour n’en citer que quelques-uns, La Fondation Luma à Arles, le Mucem de Marseille, La fondation Louis Vuitton ou même la restauration de la Bourse du Commerce de François Pinault à Paris, aucun n’arrivent au coût, ni à la cheville, de ce mammouth lyonnais de béton, de verre et d’acier.
Pour en savoir plus sur « La spirale infernale du musée des Confluences à Lyon », un rapport établi par l’association Lyonnaise CANOL.
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